Sophon & Arion

Arion et Sophon — Les Jumeaux de la Braise

Lieu de vie : Autrefois un petit village du Nord, aujourd’hui errants dans le Royaume d’Evershatter
Âge : 13 ans
Occupation : Vagabonds liés d’une conscience commune

« Quand il a mal, je saigne. Quand je dors, il rêve. Si je me tais, il pleure. Alors dis-moi, lequel de nous deux est réel ? » — Sophon

Ils n’ont aucun souvenir d’une famille aimante. Seulement d’un village froid et méfiant, où chaque regard charriait la peur. Dès qu’ils surent parler, on murmura qu’ils n’étaient pas normaux : quand Arion tombait, Sophon boitait ; quand Sophon riait, Arion avait le souffle court. Ce lien étrange, fusionnel et viscéral, troubla bientôt tous ceux qui les approchèrent. Les familles qui les accueillirent, pleines d’une bonté fragile, finirent toutes par s’effrayer de cette unité sans faille.

Alors, les portes se fermèrent. Les jumeaux vécurent comme des ombres, nourris à la pitié silencieuse des villageois. On laissait du pain à la porte, une pomme sur le seuil, mais plus personne n’osait leur parler.

Un matin de sécheresse, le sort s’en mêla. Arion, réveillé avant son frère, ressentit une envie pressante… avant de comprendre que ce n’était pas la sienne. Une course derrière un chat noir, une odeur de fumée, et la grange — leur refuge — en flammes. Quand les cendres retombèrent, Sophon sortit vivant des décombres, puis Arion, sauvé par miracle. Les villageois, horrifiés, les virent ressurgir du brasier comme deux revenants.

On les chassa. Sans un mot, les enfants partirent dans les bois, marchant côte à côte, parfois abrités dans une cabane, parfois dans une grotte, toujours ensemble. Un soir, le ciel changea. Les nuages prirent une couleur d’ambre et de rouille, la forêt ondula comme un songe fiévreux. Sans s’en rendre compte, les jumeaux venaient de franchir la frontière d’un autre monde : Evershatter, un royaume de contes brisés, engendré par l’imagination malade d’Ezra Brown.
Mais eux n’en savaient rien. Ils continuaient simplement à marcher, convaincus que le monde n’avait fait que changer de saison.


Statistiques sociales :

  • Charisme brut : 27
  • Persuasion : 25
  • Dissimulation sociale : 30
  • Intuition sociale : 33
  • Influence de l’Ombre : 31
  • Empathie brute : 34

Compétence unique — Résonance des Âmes Jumelles
Quand l’un souffre, l’autre peut inverser la douleur ; quand l’un meurt, l’autre peut, dans un élan de désespoir, le rappeler à la vie pendant quelques instants. Cependant, à chaque utilisation, leurs esprits se mêlent davantage — rendant la frontière entre eux de plus en plus floue.

Rapport d’Observation Clinique et Théorique

Sujet : Les Échoes Voidiques et leur manifestation sous forme de plaies ouvertes
Auteurs : Dr. Williams H. Campell, Paraspsychologie et Sciences Occultes – Prof. Melyfia Kingston, Entomologie


1. Introduction

Erzadon présente des marques visibles assimilées à des blessures. Pourtant, aucune étude rigoureuse ne permet de classer ces lésions dans la catégorie des traumatismes classiques. Les examens cliniques et voidologiques démontrent que ce que nous observons ne sont pas des plaies au sens biologique, mais bien des Échoes Voidiques : résonances intérieures du Vide, projetées à travers la structure corporelle d’un hôte.


2. Description des Échoes

Les Échoes apparaissent comme des entailles nettes, ouvertes, parfois suintantes. Cependant, leur constitution diffère fondamentalement d’une plaie conventionnelle :

  • Absence de lésions tissulaires réelles : les analyses microscopiques révèlent que les tissus cutanés et vasculaires demeurent intacts, bien que visuellement altérés.
  • Hémorragie illusoire : le sang perçu n’est pas d’origine biologique. Nous avons nommé ce phénomène hémomimèse voidique, un processus où l’énergie brute du Vide condense une matière pseudo-hématique imitant le sang.
  • Douleur paradoxale : le sujet ressent une sensation douloureuse intense, décrite comme une vibration intérieure, bien que les nerfs périphériques ne présentent aucune altération physique.

3. Mécanisme hypothétique

Nos recherches suggèrent que ces phénomènes résultent d’une résonance entre l’ombre voidique manquante et la structure quantique de l’hôte. Plus précisément :

  1. Désynchronisation du champ d’ombre : Erzadon, privé de son ombre voidique, génère un vide rémanent. Ce vide agit comme une dissonance énergétique constante.
  2. Perturbation tissulaire holographique : les échoes induisent une projection erronée du schéma corporel, ce qui pousse la chair à « mimer » une plaie qui n’existe pas.
  3. Saignement énergétique : le champ voidique condense les fluctuations en un fluide pseudo-biologique. Ce fluide disparaît dès qu’il est collecté, prouvant sa nature instable et non organique.

4. Implications thérapeutiques

Il est inutile de tenter toute intervention médicale classique :

  • Les sutures n’adhèrent pas, car il n’y a pas de déchirure réelle.
  • Les pansements n’agissent que comme placebo psychologique.
  • Les traitements régénératifs cellulaires échouent, car il n’y a aucune cellule à réparer.

Ainsi, ces plaies ne doivent pas être traitées comme des blessures, mais comme des manifestations chroniques d’un manque existentiel. Même si Erzadon retrouvait son ombre voidique, nous supposons que le phénomène persisterait, car l’empreinte du Vide est devenue constitutive de son être.


5. Conclusion

Les blessures apparentes d’Erzadon ne sont pas des plaies, mais des fenêtres ouvertes sur l’absence, un manque inscrit dans la chair même d’un être sans ombre. Ces Échoes témoignent de l’omniprésence du Vide en harmonie, mais aussi d’une fracture subtile, permanente, que rien ne semble pouvoir combler.

En résumé : ces saignements qui saignent sans saigner sont l’expression tangible d’un Vide devenu intime, un écho qui ne s’éteindra jamais.


Signé :
Dr. Williams H. Campell – Paraspsychologie et Sciences Occultes
Prof. Melyfia Kingston – Entomologie

« Erzadon n’est pas un lieu, ni même un être. C’est une vibration, un vide sans fin qui résonne dans chaque fragment de son existence. Ses plaies, ses échoes, ne sont que le reflet d’un manque fondamental, un silence qui cherche à se remplir mais ne trouve jamais de repos. »

La Comète du Gardien Brisé

Extrait du chapitre VII du livre des morts – La Comète du Gardien Brisé

Il y a très, très longtemps, avant même que les premières tours blanches de l’université de Easthallow ne touchent les cieux, avant que les noms des rois soient chantés dans la pierre ou que la Mort elle-même ait appris à chuchoter, il existait un être si vaste que ses pas creusaient les mers : le Titan Gardien.

Ce Titan, protecteur du monde connu, s’était endormi lorsque son devoir fut accompli — non pas dans une caverne ni dans les entrailles d’un monde, mais au cœur même des cieux, figé dans une étoile. Ce fut un sommeil millénaire, empli de silence, jusqu’au jour où un morceau de son corps se détacha. Une miette d’os cosmique, plus dense que la volonté des dieux, fendit les étoiles et tomba lentement vers la Terre.

On l’appelle la Comète de Lysathe, du nom d’un oracle ancien qui fut la première à la voir chuter. Mais cette comète… elle ne brûle pas. Elle ne crame ni l’air ni la terre. Au contraire, elle flotte, effleurant le sol comme une pensée suspendue, une énigme lourde de présages.

Sa surface est d’argent lisse, comme polie par le vide entre les mondes. Et pourtant, elle est criblée de trous non pas des cratères, mais des cavités organiques, presque respirantes. De ces orifices s’échappent des lueurs vertes, pulsantes, comme les battements d’un cœur lent mais colossal. La lumière n’éclaire pas, elle rappelle.

Et ce qu’elle rappelle… ce sont les morts.

Car la comète n’est pas un simple rocher. Elle est un fragment de volonté. Un reste de l’âme du Titan, qui refusait encore de laisser ce monde sans défense. Lorsque la comète passe, ou même lorsqu’elle dort, quelque part, sur un champ ou dans une crypte oubliée, les morts s’éveillent. Pas comme des fantômes ou des revenants, mais bel et bien dans leur chair. Les âmes, peu importe où elles dérivaient, sont arrachées à l’au-delà et renvoyées dans leurs anciens corps, qu’ils soient frais ou pourris. _ A l,unique condition que l’âme n’ai pas trouvé la lumière de la cité d’argent…

Et le plus cruel ? Ils gardent leur conscience. Ils se rappellent de leur vie. De leur mort. De tout.
Ils savent qu’ils ne devraient pas être là. Mais la comète le veut. Ou plutôt… elle l’exige.

Les sages et les nécromanciens l’ont étudiée. Certains affirment que ce n’est pas un don, mais un test. Que le Titan, bien que brisé, vérifie encore si ce monde est digne d’être protégé. Que si ses fragments sont capables d’insuffler la vie à la mort, alors ceux qui vivent doivent prouver qu’ils la méritent.

Et si ce n’était que le début ?
Car il y aurait d’autres fragments. D’autres comètes, plus grandes, plus proches. Et si l’un d’eux tombait vraiment… entièrement… alors le monde ne serait pas seulement éveillé.

Il serait jugé.

Extrait du Grimoire d’Ismerith Maes — Échos des Os Silencieux, Chapitre IX : “Ce Qui Ne Doit Pas Être Brisé”


« Ce n’est pas un don du ciel. C’est un verrou vivant. Et si vous le cassez, vous condamnez le monde à ne plus jamais clore les yeux. »

Ainsi parle Ismerith Maes, sorcière errante du Bois de Cendre, ancienne gardienne des cercles d’âme, et témoin de la première réactivation spontanée de la comète de Lysathe. Contrairement aux mages qui la convoitent ou aux rois qui la craignent, Ismerith n’y voit ni miracle ni menace, mais un cœur battant qu’on n’a pas le droit de percer.


❖ Ne jamais briser la comète

La comète, selon Ismerith, est un vérou spectral, un point fixe dans les lois mouvantes de la vie et de la mort. Tant qu’elle est intacte, l’équilibre, bien que vacillant, peut être maintenu.

Mais si elle est brisée :

  • Les morts éveillés par son appel ne pourront plus mourir à nouveau. Ils resteront figés, ni vivants, ni morts, dans des corps parfois pourris, parfois douloureux, souvent délirants.
  • Les vivants mourants ne passeront plus dans l’au-delà. Ils stagneront, conscients, hurlant dans des corps inertes.
  • Les âmes, sans guide ni passage, hanteront la matière, errant sans fin entre les objets, les lieux, les songes. Le monde deviendra un brouillard d’esprits errants, sans fin, sans but.

Et surtout :

Il n’existe aucun moyen connu de réparer un fragment brisé du Titan.


❖ Méthodes de désactivation sans destruction (selon Ismerith Maes)

  1. L’Étirement du Chant-Vert
    Un rituel utilisant le sang de trois lignées mortes, chanté à l’envers à minuit devant la comète, peut faire entrer son cœur en torpeur pendant un cycle lunaire. Mais il faut que l’un des chanteurs soit lui-même déjà mort… récemment.
  2. L’Enveloppe du Sépulcre Serein
    Une cage d’os d’ancêtres liée avec du sel noir, conçue autour du noyau lumineux de la comète. Cela ne l’éteint pas, mais l’endort lentement, comme on ferme les yeux d’un mourant.
  3. L’Acceptation de la Reine Morte
    Un pacte oublié entre l’ordre des Veilleurs et la Reine Spectrale d’Outremonde – devenue roi fantômes. Si l’on offre un souvenir d’oubli complet (comme l’existence d’un être jamais né), la comète peut être rappelée dans l’abîme. Cette méthode est extrêmement dangereuse et instable.

❖ Derniers mots d’Ismerith

« Si vous brisez la comète, vous arrachez la dernière page du livre des morts. Et ensuite ? Vous resterez là, à regarder les vivants pourrir sans partir, et les morts souffrir sans dormir. Ce sera le silence. Mais un silence qui hurle. »

La comète n’est pas faite pour être dominée. Elle est faite pour être respectée, craignée, et parfois, avec une prudence tremblante… endormie.

Numéro de dossier : #RKH-20931-A

🏥 Dossier patient – Hôpital des Quatre Anges Sacrés
📌 Ville : Cité d’Argent
👤 Nom : Mira Kelthorne
📅 Âge : 13 ans
📈 Poids : 28 kg (dont 15 kg attribués aux excroissances cornées Ramharr)
📑 Numéro de dossier : #RKH-20931-A
📅 Date d’admission : [Lundi le Second De Décembre 1799]
🩺 Médecin référent : Dr. R. Northstar

🧠 Diagnostic neurologique

Observation :
À la suite de l’accident (cause exacte à déterminer), Mira a subi un choc crânien modéré, sans fracture osseuse, mais avec lésion interne subtile sur le lobe temporal inférieur droit, détectée via spectroscopie magique cérébrale.
Cette zone étant associée à la reconnaissance faciale et mémorielle des identités sociales, des symptômes transitoires ont été observés :

  • Prosopamnésie : incapacité temporaire à se souvenir des visages connus.
  • Anomie sociale : oublis fréquents de noms propres, même proches (soignants, famille, protecteurs).
  • Durée estimée : symptômes aigus sur 4 à 7 jours. Lente régression prévue en 2 semaines.

🫀 Diagnostic cardio-respiratoire

Observation :
Mira Kelthorne a subi un arrêt cardiaque de 4 minutes et 17 secondes, consécutif à un effondrement multi-organique (voir section abdominale).
Réanimation effectuée par défibrillation occulte + perfusion de chlorélixir.
Récupération complète des fonctions cognitives supérieures constatée après stabilisation, mais vulnérabilité cardiaque résiduelle à surveiller pendant 3 lunes.


🫃 Diagnostic abdominal et génito-viscéral

Observation :
Impact abdominal majeur (probablement coup ou compression localisée).
Résultats de l’examen chirurgical :

  • Rupture de l’utérus prépubère
  • Destruction des trompes et de l’ovaire gauche par hémorragie interne
  • Nécrose partielle de l’ovaire droit constatée au 2ᵉ jour post-trauma.

Conclusion irréversible :
Infertilité permanente. Mira ne pourra biologiquement porter d’enfant.


🦴 Données morphologiques

  • Taille : 1,42 m
  • Masse osseuse et densité normale pour une Ramharr pré-adolescente
  • Cornes d’un poids combiné de 15,2 kg (non touchées)
  • Masse corporelle hors excroissance : ~13 kg — poids préoccupant. Une fragilité corporelle constitutionnelle est suspectée. Prévoir renforcement nutritionnel en phase de récupération.

📋 Remarques finales du Dr. R. Northstar

Mira Kelthorne présente un profil neurologique et organique profondément marqué par l’accident, mais son système cognitif reste globalement intact. Sa capacité de résilience émotionnelle semble exceptionnelle — probablement due à une structuration affective Ramharr renforcée.
Le deuil biologique (infertilité) devra être accompagné sur le long terme. Nous recommandons un suivi psychomagique continu. Mira reste une enfant brillante, même si elle ne se souvient plus, pour l’instant, de nos noms.

Erzadon Onophrius

Lieu de vie : Easthallow – Canada, Qc
Âge : de 0 à 3 ans
Occupation : Aucune
Parents : Jhordan Onophrius & Élona Wickside

« Je suis né deux fois… mais j’ai laissé mon ombre à la première. »

Erzadon Onophrius était plus léger, plus frêle que son frère aîné. Lorsque ses bras furent recueillis par le docteur Northstar, aucun souffle ne s’en échappa. Aucun cri, aucune chaleur. Il fut déclaré mort-né, et comme tous les enfants ainsi, son essence glissa doucement dans le Vide – cet espace au-delà des mondes, au-delà même de l’oubli.

Dans ce lieu sans nom, suspendu hors du temps, une femme attendait. Connue seulement sous le nom d’Oracle, elle accueillit l’enfant sans âme contre sa poitrine et entonna une berceuse ancestrale, tissée de silence, de paix et d’échos éteints. Erzadon s’apaisa. Il s’y sentit bien. Trop bien. Une part de lui voulut y rester à jamais.

Mais la magie d’Astariel, son frère né quelques instants plus tôt, le rappela à la vie. Le fil du souffle fut rattaché. Pourtant, l’ombre d’Erzadon ne revint jamais. Elle resta dans le Vide, lovée contre cette présence féminine qui, dès lors, devint sa véritable mère. Cette odeur, cette chaleur, cette voix… rien sur terre ne l’en approchera jamais. Pour Erzadon, Élona n’est qu’une gardienne tendre, une gouvernante attentionnée avec qui son père aurait partagé une aventure, dans l’attente du retour de la seule qu’il nomme Mère.

À son retour dans notre monde, l’enfant hurla. Ce n’était pas un cri, mais un appel abyssal, un grondement qui franchit les dimensions, faisant frémir les miroirs, les corbeaux, et les banshees de la Terre entière. Ce cri n’était pas humain. Il ne l’a jamais été.

Et cela, on aurait dû le deviner dès le premier regard : Erzadon naquit avec les yeux d’un démon, aux iris orangés et fendus, hérités de son père, Jhordan Onophrius, dont le sang porte le sanguinem de la torture. Les cheveux noirs du nourrisson formaient déjà des mèches épaisses, presque huileuses, et ses paupières semblaient lourdes de rêves qu’un enfant ne devrait pas connaître.

Depuis, Erzadon grandit dans une distance étrange. Il dort beaucoup. Parle peu. Et quand il rêve, il murmure parfois la berceuse de l’Oracle… dans une langue perdue aux vivants.

  • Statistiques sociales (âge 0 à 3 ans)
  • Charisme brut : •••○○
  • Persuasion : ••○○○
  • Dissimulation sociale : •••••
  • Intuition sociale : •••○○
  • Influence de l’ombre : •••••
  • Empathie brute : •••○○
Compétence unique : 🌘 Berceuse de l’Oracle

Lorsqu’il est en détresse ou plongé entre veille et sommeil, Erzadon peut invoquer l’écho du Vide. Cela endort ou apaise les êtres sensibles autour de lui (sauf les morts ou les possédés), mais laisse une ouverture minuscule vers l’ombre qu’il a laissée derrière… et ce qui l’habite désormais.

Astariel Onophrius

Lieu de vie : Easthallow – Canada – QC
Âge : de 0 à 3 ans
Occupation : Aucune
Parents : Jhordan Onophrius & Élona Wickside

« Certains enfants naissent. D’autres reviennent. Mais rares sont ceux qui ramènent les autres avec eux. »

Le 1er juin 1970, à 3h14 du matin, sous les orages magnétiques d’une nuit peu ordinaire à Easthallow, Élona Wickside mit au monde un garçon d’une taille exceptionnelle. Poids de naissance : 8,03 kilos. Premier-né de la fratrie, Astariel Onophrius ouvrit les yeux avant même d’avoir pleuré, observant le monde avec une lucidité que l’on n’attend pas d’un nouveau-né.

Mais ce fut à la naissance de son frère jumeau, Erzadon, que l’impossible se produisit. Erzadon ne pleura jamais. Mort-né, disaient le docteur Northstar. Pas de souffle, pas de battement. La douleur s’abattit sur la salle, brève mais tranchante. Et puis, dans l’ombre de l’instant, le cœur d’Astariel vibra d’une onde qu’aucun mage ne pourrait expliquer. Une magie silencieuse et première s’échappa de lui, trouva son jumeau, et le ramena.

Cet événement, aujourd’hui consigné dans les archives d’Easthallow, porte le nom de la Scission du Premier Souffle – un phénomène unique durant lequel une fissure mauve se dessina dans le ciel nocturne, au-dessus des tours de granit et des dômes usés de la vieille ville. Un royaume parallèle y fut entraperçu : miroir distordu d’Easthallow, hanté par des versions corrompues des Cristaux d’Onophrius. Elliott Donnagann, puissant sorcier, osa franchir la fracture. Il ne laissa qu’un mot à son retour :

« C’était notre monde, mais ravagé. Les Cristaux pleuraient une magie que je ne comprends toujours pas. »

Et pourtant, personne ne soupçonna Astariel. L’enfant grandit paisiblement, sans le moindre signe de don magique. Ses parents, soulagés de voir leurs deux fils vivants, ne soupçonnèrent jamais que le miracle venait du premier-né, pas du second. Ce secret – tissé dans la chair, gravé dans l’éther – resta enfoui, attendant son heure.

  • Statistiques sociales (âge 0 à 3 ans)
  • Charisme brut : •••○○
  • Persuasion : •••○○
  • Dissimulation sociale : ••••○
  • Intuition sociale : ••○○○
  • Influence de l’ombre : ••••○
  • Empathie brute : •••••
Compétence unique : 🌀 Vestige du Premier Souffle

Une fois par scénario, si un être vivant est sur le point de mourir, Astariel peut invoquer la résonance du souffle originel, forçant la réalité à lui offrir une seconde chance. Cette action perturbe légèrement la Dualité, attirant parfois l’attention des entités de l’autre côté.

Rapport de synthèse – Sujet 44C : Mira

Clinicienne responsable : Gloria Álvarez
Date : [Confidentiel]
Établissement : Institut de Moltenrivers – aile Est, salle d’observation B4

Observation générale :
Le sujet est une adolescente fine et droite, posture impeccable, regard soutenu mais émotionnellement lisse. Sa diction est claire, parfois élégante, presque théâtrale. Elle ne semble pas chercher à dissimuler ce qu’elle est, mais plutôt à redéfinir constamment le cadre de ce qu’on lui demande. Aucun signe de panique ni de nervosité corporelle, sauf un éclat de rire déplacé à la troisième question.

Elle semble contrôler le récit plutôt que le subir, et il est probable qu’elle ait déjà anticipé l’essentiel des questions avant de s’asseoir. L’ensemble du discours dénote une maîtrise défensive des affects, où le langage sert de filtre narratif.


Profil psychique provisoire :
Mira présente des signes de dissociation émotionnelle avancée, mais sans rupture logique : ses réponses suivent une trame maîtrisée, rationnelle, parfois trop rationnelle. Le déni direct des faits violents (cf. ingestion du demi-frère) est immédiatement suivi de formulations neutres ou positives liées à la cuisine, ce qui suggère un cloisonnement psychique actif, probablement construit très tôt.

Il faut noter l’emploi du pronom “nous” dans la réponse à la question 5 (« aucune créature ne nous a félicité »). Ce glissement grammatical témoigne d’une conscience fractionnée, possiblement bipartite, avec une cohabitation partielle ou totale d’une autre instance psychique. La négation du prénom du frère, ajoutée à une réaction physiologique modérée à l’odeur du rôti, renforce l’idée d’un événement cannibale réprimé mais non effacé.

La question 9, volontairement floue, visait à provoquer une réponse symbolique : Mira contourne cette attente en répondant par l’usage pratique de ses mains (le piano), ce qui est typique d’un mécanisme de défense par la compétence. Cela peut évoquer une stratégie de reconquête de maîtrise après un traumatisme corporel.


Analyse par item :

  • Q1–Q3 : Négation floue, déni verbal accompagné d’un rire nerveux → refoulement actif ou événement disloqué de la mémoire.
  • Q4–Q6 : Recentrage immédiat sur la cuisine comme expression artistique → sublimation du geste violent par l’esthétique. L’idée d’être regardée pendant l’acte culinaire semble centrale.
  • Q7–Q8 : Aucune image du frère n’est revendiquée, mais une réaction physiologique demeure face à l’odeur de la viande : preuve d’un résidu mnésique non conscientisé.
  • Q9–Q10 : Le rapport au corps est instrumentalisé mais pas dissocié. La main n’est pas perçue comme étrangère, mais comme outil de contrôle social (musique). L’absence d’intérêt pour le couteau est notable : soit réelle pacification, soit déplacement du danger vers d’autres outils ou gestes.

Diagnostic préliminaire (non communiqué au patient) :

  • Trouble de stress post-traumatique dissociatif avec amnésie partielle
  • Comportement obsessionnel ritualisé autour de la cuisine (sublimation et contrôle)
  • Présence possible d’une personnalité secondaire cohabitante (forme atténuée de TDI)

Note finale de Gloria Álvarez :

« Mira ne ment pas. Elle reformule le monde. Elle n’a pas tué un frère : elle a transformé une mémoire indicible en un plat élégant. Là où Ephraim cherche un royaume souterrain, Mira construit un théâtre au-dessus du vide. Elle ne mange pas la chair : elle mange l’idée. Et surtout, elle veille à ce que ce soit bien présenté. »

Rapport de synthèse – Sujet 44B : Ephraim

Clinicienne responsable : Gloria Álvarez
Date : [Confidentiel]
Établissement : Institut de Moltenrivers – aile Est, salle d’observation C7

Observation générale :
Le sujet est un adolescent de type caucasien (âge estimé : entre 14 et 17 ans), maigre, posture semi-détendue mais instable, regard fuyant. Il alterne entre des réponses lapidaires et des affirmations cryptiques. Aucune agressivité physique détectée lors de la séance, mais un refus net de fixer les objets familiers (lampe, table, carnet). Note : pupilles dilatées malgré l’absence de lumière forte. Une légère odeur de suie persistait sur ses vêtements.


Profil psychique provisoire :
Le patient exprime une fixation obsessionnelle autour du thème du feu, de la mort et d’un royaume imaginaire (ou symbolique) nommé “Royaume des Cendres”. Il ne semble pas comprendre ce concept comme une métaphore, mais comme une localisation réelle à atteindre, via des moyens non définis (cheminée, souterrain, transformation physique).

Il est important de noter que l’entrée dans ce « royaume » est associée non pas à la mort, mais à une forme de transformation minérale (“statue de pierre”), ce qui dénote une rupture perceptive entre le corps et la conscience. Cette dissociation avancée pourrait s’apparenter à une forme rare de syndrome de Cotard inversé, où l’individu ne se croit pas mort, mais figé dans une attente post-mortem.

Le langage codé utilisé dans sa troisième réponse (phrases en une langue non identifiée) pourrait relever :

  • soit d’un système de pensée délirant structuré (type schizophrénie de type paranoïde ou mystique),
  • soit d’une influence externe (autre patient, texte culte, hallucination auditive scriptée). Il affirme que Mira connaît la traduction, ce qui suppose un partage de contenu délirant : possible folie à deux.

Analyse par item :

  • Q1 & Q2 : Suggestion d’une quête initiatique liée à une culpabilité obscure (« enlever les plumes » pourrait indiquer une volonté de purifier ou d’extirper une souillure).
  • Q3 : Le “parchemin tombé” montre une altération du principe de réalité : objets perçus comme porteurs d’intention.
  • Q4 : Le rejet du soleil comme image du feu renvoie à une dissociation symbolique de la chaleur nourricière : pour lui, le feu n’éclaire pas, il consume.
  • Q5 : Absence de rêve autoproclamée ; mais il verbalise un désir d’annihilation passive.
  • Q6–Q7 : Le patient déplace les accusations (“je n’ai rien fait”), mais reste dans le thème du sacré géométrique (spirales, étoiles) et de la mort empêchée.
  • Q8 : Confusion entre les lieux (conduit/égouts), mais constante présence de passages, liquides, enfouissements.
  • Q9 : Mentions d’autres “princes”, émergence d’un univers hiérarchisé non partagé par l’observatrice. Possiblement auto-référentiel ou issu d’un mythe collectif.
  • Q10 : Présence répétée d’Iveros dans son discours : soit un alter ego, soit une personnalité tierce parasitaire. À évaluer.

Diagnostic préliminaire (non communiqué au patient) :

  • Trouble dissociatif de l’identité (à confirmer)
  • Dépersonnalisation chronique avec mythification du réel
  • Risques : isolement, fugue symbolique, passages à l’acte dans un contexte de quête fictive

Note finale de Gloria Álvarez :

« Ce garçon est en train de construire une religion. Il se place au seuil d’un monde qu’il a conçu comme réceptacle de sa propre douleur. Les symboles le guident parce qu’ils sont les seuls à ne pas le trahir. Il ne rêve pas : il prépare. Il ne délire pas : il forge un royaume à son image. Le feu ne le consume pas parce qu’il l’a déjà consommé. »